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Publié le par On Shore

titleEn cette grande époque où la communication est forte et maîtrisée, le temps de l’information pure s’affaiblit.

Chaque jour, nous sommes noyés sous les flots de faits divers, d’affaires, de politiques, mais sans plus d’investigation ou de pédagogie. Les journaux arrivent parfois à fonctionner comme un service de la communication supplétif à tel gouvernement ou organisation. Ainsi, le Figaro se décrédibilise chaque jour qui passe, tout comme TF1 et son journal de 13h. I-Télé semble, elle, avoir décidé de calquer la télévision berlusconienne avec la présence de jolies plantes. Ainsi, on apprend sur Canal plus* (la grande sœur) que, de plus en plus, les recrues sont issues du mannequinat plutôt que des écoles de journalisme pour présenter journaux et chroniques.

Ce processus est dangereux pour notre pays, et la qualité télégénique devrait avoir des limites dans la démocratie et au nom même de la République et de ses principes. En Italie, tout a commencé comme cela pour arriver jusqu’à la politique.

En effet, dans dix ans, si cette déviance continue, beaucoup de jeunes étudiants se demanderont pourquoi faire des études de journalisme si les cartes de presse sont réservées sur critères physiologiques. Comment pourra survivre l’investigation déjà fort peu présente ?

En septembre 2009, l’investigation était au programme de la chaine info signée Groupe Canal.

Moins de trois mois après, sans information, le programme a disparu comme s’il n’avait jamais existé. Désormais, sauf catastrophe ou évènement, le journal dure ¼ d’heure et se répète en boucle, sans profondeur, et ce même si la langue de la présentatrice a fourché, point de réengistrement.

La guerre de l’audience produit son effet. Preuve en est les conférences de presse de Laurent Blanc. Il y a peu, ce genre d’informations ne durait que le temps d’un résumé. Maintenant, c’est la conférence entière qui est diffusée, comme si l’évènement se dimensionnait tel un Yalta redondant. Pourquoi pas en 3D dolby surround 5.1 tant qu’on y est.

BFM, axée sur le monde de l’entreprise et de l’économie, en basant sa ligne éditoriale sur de simples raisonnements idéologiques, ne risque-t-elle pas, peu à peu, de ressembler davantage à Fox news qu’à un média sérieux et indépendant ?

Aujourd’hui, ce n’est pas dangereux parce que les gens qui regardent sont, essentiellement, des gens qui ont été éduqués avec une télévision à 3 puis 6 chaines, où la qualité d’information et le journal télévisé dispensaient culture et connaissance. Mais dans dix ans, nous en serons où ?

Si les chaines d’information ne donnent que dans la sous culture, dans les débats-polémiques sans fond et sans autorité compétente où la communication prime sur l’information et où le style l’emporte sur le fond, ne risque-t-on pas de déciviliser notre société ?

Ce canal-là d’information a de fortes responsabilités, ils devraient se rappeler comment ils savent se moquer de l’Américain moyen du Kentucky ou du Texas qui croit Obama musulman parce que désinformé et ne pas faire de nos citoyens des citoyens privés de cette chance de choisir entre l’information et le divertissement.

C’est parce que de grands médias existent que nous pouvons encore nous intéresser à des émissions où l’intelligence, de quel bord qu’elle vienne, peut s’exprimer comme chez Calvi, Jeudi investigations, Taddei, Giesbert ou d’autres. Sans le rôle et le sens des responsabilités, eux aussi disparaîtront, et c’est toute la société qui y perdra. A ignorer qu’on ne connaît pas, on s’aliène.

 

*Mouloud Achour rencontre Lorraine Denis

Publié dans Brèves Off Shore

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R
<br /> Un article de référence. Merci...<br /> <br /> <br />
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